Pour beaucoup, encore aujourd'hui, la Colombie c'est les FARCS, le narcotrafic et donc la violence et le danger. Mais quand est il de cette violence, et d'où vient elle?

Je vais tenter des bribes d'explications autour de faits historiques (selon les discussions avec les amis), ce sera assurément incomplet.


Politiquement parlant, c'est un pays qui est gouverné par la droite (voir extreme droite) depuis plus de 200 ans. Depuis toujours des voix s'élèvent pour demander plus d'égalité ou proposer un autre modele.


Le 9 avril 1948, Jorge Eliécer Gaitán, alors candidat à la présidence du pays (un des premiers à parler de politique sociale et très apprécié des classes populaires), est assassiné. Ce jour est connu sous le nom de "Bogotazo", où énormément de monde est descendu dans la rue en protestation. Ce jour marquera le début d'une guerre civile et de violences extrêmes à Bogotá (nombreux morts et bâtiments détruits), jusqu'à 1950. De là un fort conflit né au niveau national entre Libéraux (partisans de Gaitan) et conservateurs (depuis toujours au pouvoir).


Dans les années 50, de nombreuses petites guérillas armées naissent en campagne pour se défendre des actions souvent violentes des partisans conservateurs (grands propriétaires terriens ou même l'armée). Cela sous l'impulsion de quelques liders sociaux comme Guadalupe Salcedo dans les plaines de l' Est (assassiné en 1957).

De même, Manuel Marulanda Veles (fondateurs supposé des FARCS), avait demandé la construction d'hopitaux et écoles dans les campagnes, ce a quoi le gouvernement a envoyé l'armée en réponse... il semble également que les actions de ces guérillas avaient également déjà une certaine violence. De là sont nés les FARCS vers 1963.

Quelques années plus tard un lider religieux fonde l'ELN (armée de libération nationale, autre guérilla tristement connue).

Le 19 avril 1970 est fondé la guérilla M19 (mouvement du 19 avril), à l'initiative d'étudiants suite à d'apparentes fraudes électorales. Ce jour là, les élections présidentielles nomment de nouveau un conservateur, mais les chiffres sont fortement contredits... ce mouvement laissera les armes en 1990 (accord de paix) pour devenir un parti politique officiel.


Dans les années 70 commence le narcotrafic en Colombie.


En novembre 1985 le M19 opère une prise du palais de justice à Bogotá, symbole des droits de l'homme et de la justice. En réponse le gouvernement, via l'armée et la police, encercle le palais et le conflit dure 27h. Bilan, de nombreux morts dont plusieurs magistrats (notamment ceux en charge d'affaires de narcotrafic impliquant le gouvernement en place...), et également plusieurs disparus.


Dans les années 80 apparaissent les groupes paramilitaires. Au début c'est une autorisation de l'Etat à ce que les paysans s'arment afin de pouvoir se défendre. Chaque grand propriétaire terrien développe donc sa milice privée.

Les groupes paramilitaires se développent très vite, souvent en lien avec le narcotrafic et secrètement appuyés par le gouvernement. Ces groupes paramilitaires sont appelés AUC.


Les années 80 voient croitre très fortement le narcotrafic.

Les guerillas ont vu dans le narcotrafic un grand profit et une source de revenu importante. Les idéologies politiques sont peu à peu mises de côté et les pratiques deviennent de plus en plus violentes.

En 1994 meurt Pablo Escobar.

Chaque cartel de drogue avait sa propre milice (guérilla ou paramilitaire)...


À l'image du M19 devenu parti politique officiel, un autre parti s'est créé pour les élections de 1990, ami des FARCS cette fois, Unión Patriotica. Pendant ces élections de 1990 seront tués deux candidats de ces partis politiques. Et sera élu un conservateur qui ouvrira le marché colombien au marché mondial, à la suite de quoi plusieurs entreprises nationales ont coulées.


Les violences augmentent dans le pays, et particulièrement dans les zones éloignées (jungle ou montagne, et frontières). Que ce soit de la part des guérillas ou des paramilitaires: meurtres, séquestrations, disparitions, attentats, torture, enrolement de force des jeunes, etc. L'apogée de ces violences a lieu autour des années 1999 et 2000.

Tous les colombiens de nos âges ou plus âgés ont vécu cette violence et cette peur, de manière directe ou indirecte.


Certaines régions sont encore plus touchées que d'autres, comme toute la côte pacifique (notamment le Chocó), la région montagneuse du Cocuy, et Antioquia (département dont la capitale est Medellín). Medellín fait partie des villes les plus marquées par la violence, haut lieu du narcotrafic en tant que ville natale de Pablo Escobar. Certains quartiers ont vécus dans la peur et la violence jusqu'à peu. Aujourd'hui, contre toute attente c'est une des villes les plus agréable et calme du pays (nombreuses initiatives de désenclavement, démarches culturelles et sociales de la part des habitants).


De 2002 à 2010 est élu Álvaro Uribe à la présidence (extrême droite). Il est reconnu comme ayant fortement appuyé les groupes paramilitaires, favorisé le narcotrafic (avec un certain intérêt), etc. Et de manière officielle il a combattu les violences et les guérillas par des interventions de l'armée et la police d'une extrême violence (voir l'opération Orion dans le quartier Comuna 13 de Medellín).


De 2010 à 2018 c'est Juan Manuel Santos qui est élu président. Toujours de droite mais moins extrême, il initie (et signe) en 2016 un processus de paix avec FARCS. À la suite de quoi la plupart des groupements guérilleros FARCS ont laissé les armes et les violences ont très fortement diminué dans tout le pays.


En 2018, arrive au pouvoir Iván Duque (marionnette de Uribe selon de nombreux colombiens) qui ne met pas en application les accords de paix initiés par Santos... Et il continue sur une ligne politique très libérale, creusant toujours plus les inégalités (grand ami de Trump et Bolsonaro).

Ces dernières années et même très récemment, plusieurs liders sociaux ont été assassinés, par les paramilitaires ou même l'armée selon les dires. Des disparitions ont toujours lieux dont certaines se transforment en ce que l'on appelle Faux Positif (des primes sont attribuées aux policiers et soldats pour la mort de guérilleros, ces faux positifs sont des personnes innocentes enlevées et vêtues en guerilleros pour etre tuées...), pratique ignoble actuellement en vigueur...


Dernièrement de fortes mobilisations ont eu lieu en Colombie (depuis novembre 2019), pour s'opposer à certaines réforme et appelant à la fin des violences (et des faux positifs et assassinats de liders sociaux). Manifestations légales et pacifiques auxquelles l'Etat a répondu par une énorme répression...!


En février dernier a eu lieu un Paro Armado (grève armée) à l'initiative de l'ELN, chose qui n'était pas arrivé depuis très longtemps. Les guérillas sont elles en train de reprendre les armes? Le gouvernement actuel n'est il pas en train de souffler sur les braises?

Comme dans beaucoup de pays le gouvernement favorise la violence et les intérêts des plus riches au détriment du plus grand nombre...

Sauf qu'ici les habitants ont connu cette violence extrême, et ont su se reconstruire (ou sont en train de reconstruire). Les colombiens sont des peuples les plus accueillants et chaleureux de culture et de nature!

Où est ce que tout cela s'arrête?!