Le Venezuela on ne pensait pas y aller.

La crise politique que traverse le pays nous inspirait la prudence, malgré toutes les belles choses que l'on a pu entendre sur ce beau pays, riche de paysages variés, montagne, forêt, côte caraïbe... et de culture. 

Finalement notre route a croisé celle des vénézueliens, qui partent en masse de leur pays. Le Venezuela compte environ 35 millions d'habitants, déjà 10 millions seraient en exil. (D'apres ce qu'on nous a dit).

Le Brésil possède une frontière commune avec le Venezuela ce qui en fait une des portes de sortie. Les espoirs des vénézueliens sont au sud, Chili, sud du Brésil, Argentine, Pérou, Equateur, Bolivie, etc... 

Leur route croise la notre sur le bateau qui va de Manaus à Porto Velho. Sur les environs 200 passagers une bonne moitié sont vénézueliens. 

Plein de rencontres, des personnes aux profils très différents, qui pour la plupart avaient un travail et faisaient partie de la classe moyenne ou haute, avant la crise, prof, mécano, coiffeuse, chef d'entreprise... 

Sur le bateau ça parle plus espagnol que portuguais, et on écoute de la salsa.

Nous on voyage pour le plaisir, la rencontre, la découverte des cultures, on a une bonne situation en France. Eux, sur la route malgré eux, avec tous l'idée d'envoyer de l'argent à leur famille, de les faire venir si possible et de rentrer un jour dans leur pays (une fois Maduro tombé). Cela nous interroge beaucoup et nous fait réfléchir...


José (42ans) travaillait pour un garage toyota, bonne situation, il avait 5 voitures. La crise arrive, il doit vendre une voiture pour en réparer une autre, puis en vendre une autre... Finalement vend la dernière pour se payer le voyage vers le sud du Brésil pour travailler. Sa femme et ses filles (9, 15 et 17ans) sont restées au Vénézuela, il espère pouvoir les faire venir quand il aura du travail. La mère travaille mais ce n'est pas suffisant pour se nourrir correctement et les filles ne sont plus scolarisées.

Un jeune couple, travaillant à bon salaire, leur permettant d'avoir une trés bonne situation pour partir en vacances dans des endroits chics. Ils ne se voyaient jamais voyager en sac à dos. Et les voila malgré eux sur les routes, vivant difficilement le changement de statut, de classe aisée à réfugiés et étrangers... Ils vont au Chili, le pays selon eux le plus riche et stable économiquement.

Ronney, avait une entreprise de peinture automobile, ainsi qu'une ferme oú il élevait des porcs et achetait du lait pour faire du fromage. Aujourd'hui il ne lui reste que l'entreprise de peinture car il n'y a plus de production agricole dans le pays. Il est parti plusieurs mois travailler à Boa Vista puis est retourné quelques mois au Vénézuela. Voyant ses économies s'évaporer au Vénézuela il a été obligé de reprendre la route la semaine dernière, direction la Bolivie oú il pense trouver un bon travail pour envoyer de l'argent à sa mère, sa femme et ses enfants.


Aprés ces portraits rapides et bien sur incomplets, quelques bouts d'histoires du pays et d'annalyse (selon José notamment) :

Aprés une période de dictature forte (50') mais qui avait vu le pays se développer économiquement fortement. La démocratie est arrivée dans les années 80'. Avec la pression des USA, le président du moment a dévalué la monnaie qui équivalait quasi au dollars à ce moment là. L'économie du pays a chutté.

En 99 (je crois), Chavez est arrivé au pouvoir et par une politique socialiste a développé les domaines de l'éducation, de la santé, du logement, etc. Il a réussi à faire monter le prix du baril de pétrole pour cesser d'offrir les richesses aux pays étrangers. Il a nationalisé les entreprises (ce qui n'a pas toujours été concluant). Bref, tout n'était pas parfait mais le pays s'est développé et le peuple vivait bien.

A la mort de Chavez c'est Maduro qui a pris la suite (2012). Beaucoup moins fort face aux pressions internationales et beaucoup plus corrompu, il a littéralement donné le pays et ses richesses à la Russie et à la Chine. Inflation incroyable, les richesse s'évaporent et la monnaie a totalement chutté et continue dans ce sens. 1$US valait déjà il y a quelques temps plus de 3000 bolivars et aujourd'hui il est à environ 4500 bolivars.

Le salaire minimum vénézuelien mensuel est à 20 000 bolivars, sachant qu'un paquet de farine de maïs coute 7000, un paquet de riz 4000...

Aujourd'hui la Russie et la Chine ont des militaires dans la pays ; les USA sont à la frontière colombienne (pour une "aide humanitaire") et bloquent au niveau international les transactions vénézueliennes. Cela ressemble plus à un conflit international qu'à une crise interne. Enjeux économiques et politiques.

Beaucoup craignent qu'une guerre éclate et ont du mal à voir l'issue de la crise.